Résumé :
- La burrata fut créée par Lorenzo Bianchino, fermier et fromager des Pouilles, lors de l’hiver 1956
- L’invention résulte d’importantes chutes de neige qui empêchaient le transport du lait vers Andria
- Bianchino s’inspira de la technique des manteche (conservation du beurre dans des enveloppes de pâte filée)
- Il créa une poche de mozzarella garnie de crème et de stracciatella pour éviter le gaspillage
- Ce fromage, né d’un impératif économique dans une région pauvre, est aujourd’hui protégé par une IGP
Une invention dictée par la nécessité
Dans les Pouilles du milieu du XXe siècle, l’économie rurale impose ses contraintes. La région étant pauvre à cette époque, il était primordial pour les fermiers d’optimiser au mieux toutes leurs matières premières et d’éviter tout gaspillage du lait. C’est dans ce contexte que naît une innovation fromagère qui marquera durablement la gastronomie italienne.
Les origines de la burrata remontent au début du XXe siècle dans la région des Murge, aux alentours d’Andria, dans le sud de l’Italie. Mais c’est un événement climatique particulier qui précipite sa création sous sa forme définitive.
Lorenzo Bianchino, l’inventeur face à l’adversité
L’hiver 1956 frappe durement les Pouilles avec des chutes de neige exceptionnelles qui paralysent la région d’Andria. Lorenzo Bianchino, fermier et fromager local, se trouve dans l’impossibilité d’acheminer son lait vers la ville voisine à cause de la neige. Face à cette situation critique, l’homme fait preuve d’un pragmatisme qui changera l’histoire fromagère.
Bloqué dans sa laiterie avec des surplus de crème à base de lait de bufflonne qu’il ne peut écouler, Bianchino refuse de jeter cette matière première précieuse. Son génie réside dans l’adaptation d’une technique ancestrale à une problématique nouvelle.
L’inspiration des manteche
Bianchino s’inspire directement de la méthode des manteche, technique traditionnelle consistant à conserver le beurre dans des enveloppes de pâte filée. Expert dans cette méthode de conservation du beurre, il décide d’appliquer la même technique à sa crème excédentaire.
L’innovation consiste à créer une pochette protectrice en pâte de mozzarella, similaire à celle utilisée pour le beurre, mais adaptée aux spécificités de la crème fraîche. Cette enveloppe permet de mieux préserver les produits laitiers pendant le transport, rendu difficile par le climat rigoureux.
Une technique qui valorise les restes
Au-delà de l’aspect conservateur, la burrata répond à une logique anti-gaspillage remarquable. À l’origine, l’idée naît de la volonté du fromager de ne pas gaspiller la mozzarella fabriquée la veille, créant ainsi une farce avec les restes crémeux qui donneront à la burrata son goût très onctueux.
Ce fermier décide de récupérer les chutes de découpe des mozzarellas pour les incorporer dans sa création. Cette approche circulaire, typique des économies de subsistance, transforme les déchets fromagers en innovation culinaire.
De l’anonymat à la reconnaissance mondiale
Autrefois à peine connue en dehors des Pouilles, la burrata est devenue une véritable célébrité culinaire qui a explosé au sommet des menus de restaurants du monde entier après son introduction dans la scène gastronomique de Los Angeles au début des années 2010.
Cette trajectoire fulgurante illustre parfaitement comment une solution pragmatique née de contraintes locales peut conquérir les palais internationaux. Aujourd’hui protégée par l’appellation Burrata di Andria IGP, elle perpétue l’héritage de Lorenzo Bianchino tout en s’adaptant aux exigences contemporaines.
La création de la burrata témoigne de l’ingéniosité des artisans fromagers face aux défis de leur époque. D’une contrainte météorologique exceptionnelle est née l’une des spécialités fromagères les plus appréciées au monde, preuve que l’innovation naît souvent de la nécessité.